Le domaine foncier forestier marocain couvre, selon les statistiques officielles de l’Agence Nationale des Eaux et Forêts, 9 millions d’hectares, dont 5,8 millions d’hectares de formations forestières et 3,2 millions d’hectares de nappes alfatières. Ces forêts qui sont majoritairement domaniales renferment environ une quarantaine d’écosystèmes terrestres. Outre les forêts relevant du domaine forestier de l'État, il existe des forêts ayant d'autres statuts fonciers, principalement celles des collectivités ethniques, placées sous la tutelle du Ministère de l'Intérieur ainsi que des forêts privées, mais s’étendant juste sur moins d’un demi-million ha.

Le taux de boisement moyen est d'environ 8%, avec des disparités notables selon les régions forestières et les contextes bioécologiques, allant de 40% dans le Rif à seulement 4% dans les provinces du Sud et environ 30% dans la région du Moyen Atlas. Les écosystèmes forestiers renferment aussi des espaces réservés à la protection in situ de la biodiversité tels que des sites d’intérêt biologiques et écologiques, des parcs nationaux, des réserves naturelles, des réserves de biosphère et des zones humides d’importance internationale.

Ces écosystèmes abritent une biodiversité remarquable, se classant au 2ème rang au niveau méditerranéen et revêtent une grande importance à la fois sur les plans environnemental, social et économique. Dans un contexte de pénurie d'eau et de sécheresses récurrentes, l'importance écologique des écosystèmes forestiers dépasse largement leur seule valeur économique. En effet, ces forêts jouent un rôle essentiel dans la préservation de la biodiversité, la stabilisation des sols et la lutte contre l'érosion, la régulation climatique, la gestion des ressources en eau et jouent un rôle clé dans la lutte contre la désertification.

En outre, ces écosystèmes offrent des services essentiels aux populations locales, notamment en termes d’approvisionnement en bois et produits forestiers non ligneux et de création d’opportunités d’emplois et autres sources de revenus. De nouvelles opportunités émergent, également, avec le développement de très petites et petites entreprises forestières, qui valorisent à la fois les produits ligneux et non ligneux. Toutefois, ces écosystèmes sont soumis à des pressions grandissantes dues au changement climatique, aux activités humaines non durables et à une gouvernance forestière insuffisante.

La préservation et le développement des écosystèmes forestiers et leur biodiversité sont au cœur des stratégies nationales pour améliorer la gestion durable des ressources naturelles et encourager des activités économiques respectueuses de l'environnement. En réponse à ses engagements internationaux pris lors des sommets de la Terre à Rio de Janeiro (1992) et Johannesburg (2002) ainsi que dans divers accords et conventions pertinents ratifiés, le Maroc a entrepris de nombreuses réformes politiques, institutionnelles, juridiques et socio-économiques. Le Maroc a également ratifié la Convention sur la diversité biologique (CDB), mais, comme de nombreux pays, il n'a pas atteint les objectifs fixés pour 2020.

Ces réformes sont alignées sur les impératifs du développement durable des écosystèmes forestiers, en vue de leur adaptation au changement climatique. Ce processus a été renforcé par l'adoption de la Charte Nationale de l’Environnement et du Développement Durable et par le lancement, par Sa Majesté Le Roi Mohammed VI, que Dieu le Glorifie, d'une stratégie forestière intitulée « Forêts du Maroc 2020-2030 » le 13 février 2020. Dans la perspective de la tenue de la COP29, l’Institut Royal des Etudes Stratégiques (IRES) et dans le cadre de la déclinaison de ses missions de mener des études et des analyses sur des domaines jugés stratégiques pour le pays, engage une réflexion sur l’avenir de la forêt marocaine dans un contexte marqué par une accélération du changement climatique.

A cet effet, une journée d'étude et de réflexion a été organisée le 12 septembre 2024, rassemblant une vingtaine d'experts de haut niveau dans les domaines de la foresterie, du changement climatique et du développement durable (Annexe 1 : liste des participants). Antérieurement à l’organisation de cet atelier, une enquête a été effectuée en ligne à l'aide d'une plateforme numérique, durant la période du 15 au 31 août 2024, à laquelle plus de 92% des 300 personnes ciblées, soit 277 répondants de profils sociodémographiques et professionnels variés, dont la plupart d'entre eux sont soit des experts, soit des professeurs universitaires ou des acteurs de terrain ayant une bonne maîtrise de cette thématique. Les caractéristiques sociodémographiques et professionnelles de l’échantillon sont présentées dans l’encadré, ci-contre.